Des petits pouilleux à Nice décrit une époque où les commodités de la vie quotidienne n’étaient pas accessibles aux habitants du Vieux-Nice.
» La vieille ville de Nice, qui a conservé sa couleur locale, est presque partout non carrossable.
Ses rues tortueuses, sombres, étroites, dont la plupart sont si escarpées qu’on ne les gravit qu’au moyen de véritables escaliers, sont presque partout tendues de loques pendantes, qui attendent un rayon de soleil pour pomper leur humidité et derrière lesquelles on voit des femmes sordides, mais superbes, aux jupes effilochées, aux corsages crevassés, mais aux chevelures qui traînent sur le dos en cascades merveilleuses, ou qui se relèvent sur leurs nuques en torsades opulentes.
Çà et là, des enfants, nus comme des vers, ou déguenillés comme des Gallot, et suffisamment ornés de vermine pour ressembler au petit pouilleux peint par Bartolomé Esteban Murillo, se vautrent dans les flaques de boue avec les chiens et les porcs.
C’est repoussant comme civilisation, mais superbe, de cette poésie réaliste que les bourgeois ont le courage d’appeler de la saleté, et en somme très curieux, d’autant plus curieux qu’on est à cinq minutes de la ville moderne, rendez-vous de toutes les élégances, seulement :
« Regardez, mais n’y touchez pas. ». »
Cette description peu flatteuse de la vieille ville de Nice date de…1891. Elle apparaît dans le numéro du journal hebdomadaire illustré « La Joie de la maison » du 10 octobre et illustre Des petits pouilleux à Nice.