Picasso tourne à Vallauris permet d’avoir un regard sur la création de ce grand artiste dans son atelier.
» Il y aura bientôt un an que cela dure…
Depuis juillet dernier, Picasso passe presque toutes ses après-midis à la petite cité potière de Vallauris, près de Golfe-Juan.
A Vallauris, tout le monde « tourne », peint et cuit la terre, Picasso comme les autres.
Picasso dans son atelier de Vallauris
En réalité, il ne « tourne » pas directement lui-même, il surveille l’opération et donne, au moment opportun, le coup de pouce, le coup de patte qui transformera le vase à long col en une petite déesse faussement ingénue, l’aiguière pansue en commère aux larges hanches, et la cruche avec ses anses en bouquetin stylisé « aux belles cornes », décoré de géométries noires ou brun rouge.
Il y a de véritables sculptures : un animal fabuleux, des centaures, des taureaux ; mais aussi de la vraie céramique, des plats à la Bernard Palissy, au décor en relief, oiseaux, poissons, et même couple d’œufs, fourchette et morceau de boudin…
Il y a enfin de tout simples plats faits au moule, mais on n’oserait y présenter même des fruits. Tous les jeux de la couleur et de la matière en ont fait des objets précieux, uniques — des œuvres d’art, de vrais Picasso.
« Oui, dit-il gentiment, je m’amuse. Pourquoi n’aurait-on pas le droit de s’amuser ? ».
Les poteries de Vallauris
Evidemment. Mais mener les jeux du primitif et de l’enfant sans rien renier d’une des plus prodigieuses aventures poétique et plastique de l’époque n’est peut-être pas donné à tout le monde.
Matisse ne s’y est pas trompé, qui est venu voir Picasso à Vallauris et s’est mis lui aussi à faire de la céramique. Le poète Pierre Reverdy non plus, qui, pour sa part, a voulu laisser quelques poèmes écrits de ses mains dans l’argile à potier…
La grande leçon, en tout cas, est cette liberté du jeu retrouvée par un grand peintre. »
Picasso tourne à Vallauris est extrait du journal « Combat » du 7 avril 1948.
Un autre article de Passion Riviera.