Gravures de la vallée des Merveilles raconte les premières découvertes effectuées dans la région de Tende.
« J’étais monté deux fois aux lacs des Merveilles, et avais trouvé facilement les gravures rupestres à proximité de la route et des lacs.
Exploration dans le Val Casterino
Mais, en 1897, quand je louai la seule maisonnette à ma convenance, dans le Val Casterino, je commençai à comprendre que la région avait été fort peu explorée, qu’il existait des dessins ailleurs.
Aussi, avec mon aide-botaniste et ami, M. Pollini, nous décidâmes incontinent d’étudier toute la contrée, et depuis nous avons passé huit étés dans le Val Casterino.
Le logis que je louais ayant été vendu en 1903, je dus en faire construire un autre pour pouvoir continuer mes études.
Dès l’année suivante, celui-ci fut prêt et nous y séjournâmes chaque été, depuis le milieu de juin jusqu’à la fin de septembre, faisant le plus d’explorations possible, dessinant et photographiant.
Ces dessins ont été gravés dans les montagnes qui dominent la ville de Tende, connue comme le lieu où mourut l’infortunée Béatrice, dont la musique de Bellini a illustré le terrible sort.
On peut accéder à pieds ou à mulet à ceux qui sont les plus proches de la ville, au bout de six heures de marche.
On peut se loger aussi aux mines plombifères de Tende, creusées jadis par les Sarrasins. De là il suffit de trois heures pour se rendre aux roches, et de deux, depuis notre petite habitation.
Merveilleuses gravures rupestres
Nous pouvons affirmer qu’il existe plus de dix mille inscriptions, de la préhistoire à des temps plus récents, ce qui est un nombre fort important.
Nous devons rappeler que, quoique certains dessins, petits ou mal gravés, aient pu être exécutés assez rapidement, beaucoup d’autres ont exigé bien des heures de fatigue et de patience.
La meilleure de ces gravures relativement modernes est une cotte d’armes, très grande et d’excellente facture.
L’écusson, surmonté d’un casque, porte plusieurs fleurs de lys, avec au-dessus la date de 1628 et le nom d’Humberto de l’Agarena-Vienne.
Au-dessous se reconnaît, quoique très usée, la devise célèbre : « Afalo mori quam fœdari », soit « Je préfère la mort au déshonneur ».
Sur les auteurs de ces gravures ou les artistes comme nous nous plaisons à les nommer, on ne sait rien.
Les traditions qui attribuent ces œuvres aux soldats d’Annibal, ou à quelques autres troupes militaires dans ces derniers siècles, sont également sans valeur et ridicules.
On ne peut croire non plus que des chasseurs ou des pâtres ont choisi comme sujets des bœufs et des charrues.
Quant aux Mahométans qui ont exploité des mines à proximité, leur religion leur défend la représentation d’hommes ou d’animaux.
Sans aucun doute, ces dessins remontent à une époque bien plus reculée. »
Gravures de la vallée des Merveilles est un texte de Clarence Bicknell publié en 1911 dans le « Bulletin de Société d’histoire naturelle et des amis du Museum d’Autun ».