Mort d’Alexis de Tocqueville à Cannes relate les derniers moments de l’auteur de De la démocratie en Amérique .
Repos forcé à Cannes
” Les médecins, qui, après la première atteinte de sa maladie, l’avaient envoyé en Italie, dans le golfe de Sorrente, pour y rétablir sa santé compromise, l’envoyèrent alors dans le midi de la France, sur les côtes de la Méditerranée.
Il s’y rendit avec fatigue, mais avec espérance, et, toujours préoccupé de ce qui lui restait à faire, il écrivait sur ce chemin de la mort :
« Je vais à Cannes pour y passer l’hiver. Si je suis passablement portant, j’y travaillerai d’une manière efficace. »
Il demeura cinq mois à Cannes, dans une villa charmante dont le séjour, d’abord favorable, semblait promettre la guérison de son mal. Il y était avec sa fidèle compagne, qui ne le quittait pas, et il y recevait de longues visites de ses deux frères et de ses amis les plus chers, qui lui apportaient, avec les témoignages de leur tendre attachement, les douces distractions, de leurs entretiens.
Mort d’Alexis de Tocqueville
La terrible maladie n’en suivait pas moins son cours et le conduisait par degrés à l’issue fatale qu’on craignait autour de lui et dont, seul, il conservait l’heureuse ignorance.
Peu à peu les symptômes s’aggravèrent, l’affaiblissement s’accrut, il ne pouvait plus marcher, et, pour ajouter à sa tristesse, son épouse, que les fatigues et le chagrin avaient rendue malade, était retenue dans sa chambre par une inflammation des yeux qu’offensait le plus petit rayon de lumière.
Il était arrivé au dernier terme du mal, et il s’en croyait guéri.
Le 16 avril 1889, sur le fauteuil où il était étendu, au milieu des rêves d’avenir que lui inspirait son imagination invinciblement confiante, il expira doucement sans s’apercevoir des approches de la mort.
Ainsi finit, jeune encore et sans avoir terminé tout à fait sa tâche, le noble, le pur, le regrettable Alexis de Tocqueville. “
Mort d’Alexis de Tocqueville à Cannes est extrait du livre “Nouveaux éloges historiques” de François-Auguste Mignet, édité en 1877.