Un vieux moulin à Nice raconte l’histoire de ce qui est aujourd’hui le Musée Prieuré du Vieux Logis sur l’avenue Saint-Barthélemy.
» C’est une singulière destinée que celle de cet humble moulin du quartier Saint-Barthélemy, à Nice, qui va devenir un musée.
Un moulin puis une ferme
Le quartier de Saint-Barthélemy possède déjà le charme franciscain de son église, les merveilles si bien méditerranéennes de la Villa Arson. Il va posséder un musée, et non des moins attractifs.
Au pied du coteau de Saint-Barthélemy, vers l’est, coulait jadis dans la plaine du quartier Gorbella un petit ruisseau.
Ce petit ruisseau avait juste assez de force pour faire marcher un moulin à huile.
Le premier bâtiment de ce moulin date du XVe siècle. Il s’agrandit ensuite de constructions contiguës.
Puis, au siècle dernier sans doute, le moulin s’arrêta de tourner. Ce fut alors la ferme de « Lou Pias ».
La ferme elle-même fut bientôt submergée par la marée montante de la grande cité niçoise. Elle perdit ses terres alentour. Le petit chemin devint l’avenue Saint-Barthélemy qui n’en fut pas plus belle ni mieux entretenue parce qu’elle était « avenue ».
Dans un quartier banal de banlieue, « Lou Pias » devint un « coin pittoresque », une de ces vieilles maisons devant lesquelles les peintres viennent planter leur chevalet.
C’est alors que, un jour, allant à ‘église des franciscains, passa un pieux dominicain, le R. P. Lemerre.
Le R. P. Lemerre est un grand amateur d’art, spécialiste des époques gothiques et renaissance.
Habitant hors des couvents de son ordre depuis la loi de séparation de 1905, il avait considérablement augmenté le noyau de meubles et d’objets d’art qui venaient de sa famille.
Il voulait reconstituer le plus exactement possible un intérieur du XVe et XVIe siècle. Et, pour cela, il cherchait un cadre.
Une villa puis un musée
Ainsi, quand à Nice, il vit « Lou Pias » il comprit que ce devait être là et non ailleurs qu’il amasserait les meubles et objets d’art venus des quatre coins de France, et d’autres encore qu’il continuerait à amasser.
C’était en 1919. Ayant acquis l’immeuble, le R. P. Lemerre s’y installa en 1922. Il transforma alors lentement, au cours des années qui suivirent, l’aspect extérieur et intérieur de « Lou Pias », qui devint « Le Vieux Logis ».
Un porche, un escalier, une terrasse, un clocheton furent successivement ajoutés. Et sans le concours d’aucun architecte « Le Vieux Logis » devint, pour le passant, une belle villa du plus pur style « provençal », dont la belle couleur ocre foncé ressort à merveille sur un fond de jeunes cyprès.
Mais l’extérieur n’est que charmant. L’intérieur est prodigieux. Cette villa moderne, bien que de style traditionnel, devient, dès qu’on y pénètre, un intérieur du XVe et XVIe siècle.
Ce fruit de toute une vie d’artiste, le R. P. Lemerre n’a pas voulu qu’il meure un jour ; il n’a pas voulu que cet ensemble unique soit dispersé. Et il a donné, de sa pleine volonté, « Le Vieux Logis » à la Ville de Nice, et, autant qu’à la Ville elle-même, à son maire, M. Jean Médecin, dont il a pu apprécier l’oeuvre, étant lui-même président du Comité de quartier Saint-Barthélemy.
L’acte est dûment passé devant notaire. En novembre, le Conseil Municipal de Nice a accepté la donation. »
C’est aujourd’hui le Musée Prieuré du Vieux Logis au 59 de l’avenue Saint-Barthélemy.
Un vieux moulin de Nice est un texte découvert dans la revue « L’Eclaireur illustré » du 1er janvier 1936.