Fête vénitienne à Nice est une histoire qui raconte un moment fort du programme des fêtes de la ville.
» Le clou de tous les plaisirs du printemps, à Nice, a été la fête vénitienne.
Figurez-vous qu’on avait installé devant le quai du Midi trois bricks à cinquante métres de distance les uns des autres.
Pendant la journée, la mer avait été quelque peu tourmentée par une brise du nord-est assez fraîche; mais le soir elle s’était calmée et les flots s’endormaient en venant caresser doucement la rive.
Nuit absolument sombre.
Tout à coup du sein des flots s’élancent à leur tour les myriades d’étoiles du feu d’artifice qui veulent escalader les cieux.
Le canon tonne, le combat s’est engagé entre les trois bricks, les obus polychromes volent, se croisent, éclatent, et sur le pont des navires les silhouettes des noirs artificiers se découpent comme des invraisemblances de Caran d’Ache.
Puis, tout à coup, du fond de la baie des Anges, transformée en cratère, s’élance une gerbe de flammes immense qui retombe bieutôt en cascades de feu dans les flots irrités.
L’obscurité a repris possession de son empire. mais là-bas, là-bas, bien loin, des petits points brillants et multicolores piquent l’horizon.
Ils se rapprochent insensiblement de la côte. La luciole devient lanterne, la bactérie se transforme en lumière bientôt on voit distinctivement une flottille de cinq cents petits bateaux.
Ce sont les pécheurs de Nice qui viennent terminer la fête.
Partout, aux mâts, aux cordages, ils ont accroché leurs petits lustres de papier peint. Tout cela marche, se balance en cadence.
Enfin, du fond de chaque nacelle à un signal donné, s’allument des moines, autrement dit des feux de Bengale de toutes couleurs.
C’est un rêve des Mille et une nuits. inoubliable !
Par une coîncidence étrange, au moment où le dernier feu mourait lentement à l’horizon, le secrétaire général du Comité des fêtes, M. Saétone s‘éteignait ,lui aussi, doucement. »
Fête véntienne à Nice est un texte tiré du journal « La Grande revue » du 10 avril 1889.