La police secrète du prince de Monaco raconte avec un brin d’humour pourquoi les monégasques ont appris à tenir leur langue.
Les cactus écoutent les secrets
“Rien n’échappe à la surveillance du prince de Monaco.
Sa police secrète est des mieux organisées. Les murs, les rochers et jusqu’aux cactus de Monaco ont des oreilles.
Malheur à l’infortuné Monégasque qui se permettrait de tenir des propos malsonnants sur le prince et la principauté !
Même dans les réunions de famille, dans les fêtes les plus intimes, personne n’ose parler à cœur ouvert.
Si parfois, excité par la chaleur d’un repas trop copieux ou par un de ces diables de petits vins blancs du Midi qui montent si vite à la tête, quelqu’un s’avise de commencer une phrase dangereuse, de faire une allusion intempestive à quelque fait fâcheux de l’histoire du pays, par exemple à la révolution à jamais coupable dans laquelle Monaco a perdu les communes de Roquebrune et de Menton, aussitôt tous ses parents et amis pâlissent, et l’air d’effroi qui se répand sur leur visage prévient l’imprudent de la faute qu’il est sur le point de commettre.
Le prince de Monaco police par la corne d’abondance
Sans doute, le prince n’a ni prisons, ni bastilles, ni lettres de cachet pour punir ses sujets de leurs critiques.
Mais, comme tout le monde vit de lui, comme les charges de la cour, les fonctions publiques, les emplois administratifs sont la seule richesse des familles indigènes, il les tient par le lien le plus puissant, celui de l’intérêt.
Que seraient à côté la terreur des supplices et l’effroi des cachots ?
Perdre les bonnes grâces du prince, c’est perdre une bonne place ; et perdre une bonne place, mieux vaudrait monter sur l’échafaud ! “
La police secrète du prince de Monaco, ici Charles III, est un récit provenant du livre “Les stations d’hiver de la Méditerranée” de Gabriel Charmes, paru en… 1885.