La joueuse de Monte-Carlo raconte la vie fantasque de la princesse Souvaroff connue pour fréquenter assidûment le casino de Monaco.
La joueuse la plus célèbre
La princesse Souvaroff et sa sœur, la comtesse de Galve, pourraient revendiquer l’honneur d’avoir puissamment contribué, à partir de 1865, à la vogue de Monte-Carlo.
Quand on demandait :
– Quel est le plus « beau » joueur de Monaco ?
On répondait invariablement :
C’est la princesse Souvaroff !
Bien que son peu de chance fut passé à l’état de proverbe, il arrivait cependant que des semaines de « déveine » faisaient place à une heure de réussite.
Un soir, elle gagna 150.000 francs, représentant une partie des pertes subies précédemment.
Il y eu, pour fêter ce coup heureux, joyeuse réunion dans sa villa de la promenade des Anglais. On invita tous las amis et connaissances. Plusieurs, parmi les intimes, eurent leur part du gâteau.
La domesticité ne fut point oubliée. Comme cette dernière attendait, rangée en ordre de bataille, l’arrivée de sa fastueuse maîtresse, celle-ci jeta aux mains de ses valets une liasse de billets de banque.
– Tenez, fit-elle, amusez-vous.
Et, hautaine et souriante, elle continua sa route, suivie par un brillant et bruyant état-major de viveurs et de désœuvrés.
La joueuse de Monte-Carlo décroche le gros lot
Le souper fut marqué par un de ces incidents que l’on se plaît à redire.
Au moment le plus animé, la princesse, que sa chaussure gênait, enleva sans façon une de ces bottines – une délicieuse bottine de satin blanc – et la lança au loin.
Aussitôt Honorine, l’actrice du Palais-Royal, que la princesse appréciait particulièrement, se leva d’un bond, ramassa la bottine, la remplit de champagne, et levant en l’air cette coupe d’un nouveau genre :
– Je bois à la princesse, fit-elle, et, joignant le geste à la parole, porta la bottine à ses lèvres et la vida d’un trait, jusqu’à la dernière goutte, sous les applaudissements de l’assistance.
Précisons que la joueuse de Monte-Carlo réussit presque à se ruiner au casino.