Les émigrés français de Nice est un récit qui rappelle qu’au moment de la Révolution française de nombreux nobles ont trouvé refuge dans cette ville étrangère.
» Le Boulevard du Midi, qui s’étend à l’Est de Nice du Pont des Anges jusqu’à la base de la colline du Château, est planté de palmiers le long du rivage.
Il est aussi bordé à votre gauche de belles constructions parmi lesquelles vous remarquerez l’élégante villa du Comte de Kersaint.
Les terrasses de Nice
Puis, viennent deux longues rangées parallèles de maisons basses, d’égale hauteur, couvertes en terrasse, qui séparent le Boulevard du Midi de la Promenade du Cours.
Ces Terrasses, où l’on monte par un large escalier, ont été longtemps la merveille de Nice, pauvre merveille, aujourd’hui bien vieillie, bien déchue, bien démodée, et dont l’aspect minable ne peut vous rappeler les anciennes splendeurs.
L’une, celle qui s’élève le long de la Baie a été construite au milieu du siècle dernier, alors que la ville de Nice commençait à s’étendre au Sud entre la rive gauche du Paillon et la mer, couvrant de ses constructions nouvelles l’ancienne plage d’échouage qui avait si longtemps servi de port aux premiers habitants de Nice.
Nice n’était plus une place de guerre.
Les grands personnages étrangers commençaient à y affluer en hiver, attirés par la douceur de son climat, et les habitants, pour les recevoir, travaillaient à embellir leur ville.
Le refuge de Nice
Jusqu’à l’époque de la Révolution française Nice progressa.
Elle eut un moment de grande prospérité : les émigrés français, gens de robe ou d’épée, abbés et gentilshommes vinrent alors, très nombreux, à Nice.
A l’heure de la promenade, on les voyait sur la terrasse, agités et remuants, formant des projets hardis pour la délivrance de leur Roy, rêvant de mettre à merci ces manants insolents qui pillaient leurs châteaux, partageaient et achetaient leurs terres.
Narguant le drapeau aux trois couleurs qu’ils voyaient flotter sur le Fort-Carré d’Antibes, puis frivoles, sémillants et charmants sous leurs habits brillants, ils s’empressaient auprès des dames nonchalantes, provoquantes sous leurs atours coquets, sous la poudre qui couvrait leur chevelure, leur adressant quelques compliments galamment troussés, maniérés souvent, et toujours un peu lestes.
La Terrasse alors offrait un spectacle charmant et très animé.
Cela dura jusqu’au 30 septembre 1792, jour où le général Anselme, à la tête du bataillon des volontaires du Var, entra à Nice, sans combat.
Pendant la nuit précédente, les cinq mille émigrés français qui étaient encore à Nice, s’enfuyaient précipitamment, dans une débandade épouvantable, par la route de Turin. »
Les émigrés français de Nice est un texte extrait du livre « Au pays des enchantements » de Gustave Somons, publié en 1893.